Premier post réservé à Ash <3
- Citation :
- Histoire que tu ne te retrouves pas seule face à ton assiette à midi, je te propose de me rejoindre à la table des Poufsouffles.
Ash.
A croire que les hiboux et autres messages indirects étaient devenus le seul moyen de s'approcher de la préfète des rouges et or. Il fallait avouer qu'elle réunissait toutes les conditions pour dissuader quiconque de lui adresser la parole ou même de lui accorder un unique regard. L'inquiétude qu'elle pouvait lire dans les yeux de ses amis l'exaspéraient, et la pitié qui émanait du visage de gens qu'elle connaissait à peine lui donnait simplement envie de foutre leur tête dans un chaudron à la solution bouillante. Enfin une utilité directe qu'aurait trouvé la potion. Alors même les amis, elle avait tendance à les éviter. Là, depuis tous ces longs moins qui ressemblaient à une infinité de jours, un seul visage aurait pu la faire sourire à nouveau. Un seul visage aurait pu sécher ses larmes qui glissaient jour après jour sur ses joues pâlies par le chagrin; un seul sourire aurait pu lui apporter un réconfort dont elle n'aurait alors plus besoin; un seul regard aurait pu changer sa vision entière de la vie telle qu'elle était maintenant. Mais ce visage, elle ne le verrait plus jamais. Ce regard brun qu'elle aimait tant s'était éteint et ce, pour toujours. C'était un fait qu'elle n'arrivait à admettre, et malgré les mois qui passaient, elle n'arrivait plus à sortir de cet état dans lequel elle était. Plus personne n'osait l'approcher. Les profs avaient bien essayé lorsque ses notes s'étaient mises à chuter et qu'elle manquait de plus en plus de cours pour s'isoler dans des toilettes, là où personne n'irait vérifier qu'elle ne pleurait pas comme la faible demoiselle qu'elle était devenue. Oui, parce que c'était le mot : elle était faible. Chose qu'elle s'était interdite depuis toujours. Elle avait toujours gardé une part de force quelque part en elle, quelle que soit l'épreuve qu'elle traversait. Mais jamais elle n'avait vécu chose si dure... oh non, jamais. Et elle ne le souhaitait à personne, sauf à Alice Ewing. Oh, elle, elle lui souhaitait les pires tourments que la vie puisse apporter. La vie, ou Ange, qui pourrait personnellement se charger de lui en fait voir de toutes les couleurs. Elle avait beau être faible, une chose la maintenait encore pas trop loin de la surface de l'eau sombre dans laquelle elle flottait : c'était la promesse de venger Alban. Parce qu'en le perdant, c'était comme si elle avait perdu toute étincelle de vie qui coulait auparavant ses veines. Tout ce qu'elle avait bâti, tous ces projets qui avaient commencé à revoir le jour alors qu'Alban allait peu à peu mieux, toutes ces belles promesses qu'ils s'étaient faites... Tout avait disparu en une seconde. Juste le temps pour une brune de prononcer les deux mots qui avaient mis fin à la vie d'Alban, et à celle d'Ange par la même occasion. Peut-être aurait-elle mieux fait de ne pas courir après la vérité comme elle l'avait fait. Peut-être que finalement, tout ignorer aurait été la meilleure des solutions en lui épargnant toute souffrance et tout chagrin. Mais cette amnésie ne l'avait pas changée, elle était toujours aussi entêtée. C'était la perte qui l'avait changée. Elle était passée de l'état de femme battante à celui d'une gamine perdue dans le tourbillon d'une vie dans laquelle elle ne voyait plus guère de lueur d'espoir. C'était ça. Et depuis qu'elle savait, elle s'en voulait d'avoir à tout prix cherché à connaitre l'histoire, la vérité. A savoir qu'elle avait pu aimer, à se remémorer chacun de leurs moments, à les revivre dans des rêves qui n'étaient plus qu'illusions. Elle aurait voulu oublier pour toujours ce regard qui l'avait rendu si heureuse auparavant, puisque le souvenir de celui-ci ne lui faisait maintenant que ressentir une douleur intense et insaisissable, une douleur que personne ne pouvait apaiser, que le sommeil augmentait en faisant apparaitre des images qu'elle se forçait tant bien que mal à obscurcir lorsqu'elle était éveillée. Si la journée était un combat perpétuel contre les images qui remontaient à flot, tant de bonheur aux côtés de celui qu'elle aimait que de tristesse en revoyait chaque image de son décès, la nuit était encore pire. Ce que des psychologues appelaient inconscient prenait le dessus et c'était alors le début d'une longue phase de cauchemar. Les cachots qui l'abritaient alors ne changeaient rien. Elle était dans son lit, ses cheveux chocolat collés à son front par la sueur. Elle se retournait dans tous les sens, gênant sans doute quelques collègues de dortoir dans leur sommeil. Mais elle n'y pouvait rien. Elle n'avait même pas comme choix possible de se réveiller et de garder les yeux ouverts le reste de la nuit pour éviter toute image incontrôlable. Elle pleurait sans s'en rendre compte et faisait de ses draps un champ de bataille. Le moment du réveil ne la laissait pas en reste pour autant : il s'agissait alors de faire bonne figure. Et même si ce moment arrivait parfois -voire souvent- au beau milieu de la nuit, elle se devait de reprendre son calme, de sauver les apparences, de ne rien laisser transparaître. La pitié, elle ne voulait pas la voir. Et il ne fallait pas non plus oublier que les Serpentards étaient là, puisqu'elle dormait chez elles, comme toutes ses compatriotes de Gryffondor. Subir leurs moqueries et leurs remarques n'étaient pas chose aisée. Et si autrefois elle s'amusait à leur en faire voir de toutes les couleurs, aujourd'hui elle en subissait les conséquences. Maintenant que toute garde était baissée, qu'elle n'avait plus aucun bouclier et qu'elle était... fragile, tout simplement. Elle se défendait en jetant un venin qu'elle ne se connaissait pas, lançant des remarques, des réponses et des piques cinglantes. Tout ce qui lui restait, c'était sa répartie. Elle n'attaquait plus, contentant de se défendre. Ses yeux verts avaient oublié ce qu'était de regarder quelqu'un avec amour, compassion, humour, joie. Ils ne pétillaient plus comme autrefois. Ils étaient encadrés de cernes sans doute encore pire que celles qu'arborait Alban au pire de sa forme. Elle ne mangeait plus, ne dormait plus. Elle ne faisait plus attention à elle, à son apparence. Les larmes étaient devenues sa seule compagnie, en plus de cette photo froissée du couple heureux qu'ils formaient, à leur dernier bal. Ensemble, tout sourire. Parfois, au milieu de la nuit, lorsqu'elle fermait les yeux, luttant pour ne pas s'endormir pour revivre un cauchemar une fois de plus, elle se surprenait à entendre un souffle lui murmurer à l'oreille « je t'aime », et elle ouvrait brusquement les yeux, cherchant naïvement l'étreinte de celui qu'elle aimait et aimerait toujours. Mais il n'était pas là. Elle réalisait, ne réalisait plus. Il n'était pas, ne le serait plus jamais. Et plus jamais il ne lui dirait « je t'aime », si ce n'était dans ses rêves. Rêves qui s'avéraient être des cauchemars lorsqu'elle se réveillait et que la réalité la rattrapait. Lorsqu'elle réalisait qu'elle n'était plus dans la haute et imposante tour des rouge et or mais chez les serpents, et lorsqu'elle réalisait que cela faisait déjà de nombreux mois que le corps de son aimé avait rejoint la terre.
Alors oui, quand toutes ces choses se passent dans l'esprit d'une personne faible comme Ange l'était, cela rend cette personne hors de portée. Inatteignable. Parce qu'elle est ailleurs, parce qu'on a l'impression que lui dire le moindre mot la briserait et qu'elle ne s'en relèverait plus jamais. Alors, presque plus personne ne lui parlait, préférant la facilité du regard rempli de pitié ou de peine. La peine était réservée à ses amis. Mais elle ne voulait pas. Elle ne voulait pas lire de telles choses dans les yeux de ceux qu'elle aimait. Elle voulait leur montrer qu'elle était forte. Or, elle était faible. Alors, elle se cachait. Dans les toilettes désaffectées, au fond d'un bosquet d'arbres dans le parc ou dans une salle de classe déserte. Là où personne n'irait la cherchait ou ne la trouverait par le plus hasardeux des accidents. Elle voulait être seule. Et elle pleurait. Sans relâche. Offrant à ses yeux les vaisseaux dilatés d'un drogué de première classe. Comme ceux qu'avait eu Alban. Et puis, Ashley s'était risquée. Ashley. Ashley... Oui, elle se souvenait. Ashley aussi vivait de durs moments. Et Ange n'était pas là pour elle.
Oh, Ashley, pardonne moi... Elle abandonna le petit hibou qui lui avait apporté le morceau de parchemin et le regarda sans grand conviction, les sourcils plissés. Et plus tard, à l'heure du déjeuner, c'est à la table des Poufsouffles qu'elle s'installa. Pour ce que ça changeait... Elle enjamba le banc pour s'y assoir, réunissant ses deux mains qu'elle plaqua entre ses deux genoux serrés. Elle fixa l'assiette vide qu'avait sans nul doute préparé un elfe de maison avec amour et attention. Mais l'assiette resterait sans doute blanche et vierge de toute nourriture. Et le regard vide, c'est cette maudite vaisselle qu'elle fixa pendant de longues minutes. Les autres étudiants parlaient avec en-train des derniers potins et des cours qu'ils avaient eu dans la matinée, des notes à tel devoir et de la tenue de tel prof. Oui, elle avait été comme eux autrefois. Aujourd'hui, tout était différent. Chaque seconde peut changer une vie entière. Et ça, Ange l'avait appris à ses dépends. Ne jamais rien considérer comme acquis, car quand bien même vous mesurez toute l'importance d'une personne, cela ne vous empêchera pas de la perdre pour une raison X ou Y. Parmi tous les échos des conversations qui parvenaient jusqu'à ses oreilles, elle n'entendit pas son amie de longue date arriver derrière elle. Elle ne vit pas non plus ses cheveux roses qu'Ange avait toujours tant admiré. Elle fixait toujours son assiette d'un regard vide. Si elle était de bon poil, elle mangerait peut-être un morceau de pain, histoire de ne pas se retrouver à l'infirmerie pour hypoglycémie à seize heures.